Les
couleurs du blason et les fourrures héraldiques
Règle
héraldique de l'alternance des émaux
LES
COULEURS DU BLASON ET LES FOURRURES HERALDIQUES
Dès lorigine,
lhéraldique ne se servira que dun nombre restreint
de couleurs qui depuis le XVe siècle portent le nom générique
démaux. Les émaux ordinairement utilisés
sont au nombre de sept, auxquels il faut ajouter quelques teintes
rares parfois fort anciennes. Ces couleurs sont franches et sans
nuances ; pour prendre un exemple, lécarlate, le
vermillon ou le carmin ne sont pour le blason quune seule
et même couleur, le rouge (gueules). Ces émaux se
partagent en deux groupes : celui des couleurs proprement dites
dune part et celui des métaux dautre part.
Ces deux groupes sont à lorigine de la règle
héraldique fondamentale interdisant la juxtaposition ou
la superposition de deux émaux dun même groupe
dans la composition des armoiries (voir la règle dalternance
des couleurs dans le blason). Le nombre restreint de couleurs
et leur emploi réglementé, sans doute hérité
des enseignes vexillaires préhéraldiques, détermine
loriginalité du système héraldique
européen par rapport aux autres systèmes demblèmes
dans le monde, en ce sens que les règles héraldiques
précédèrent le système héraldique.
Les émaux
du groupe des métaux sont lor et largent, représentés
par le jaune et le blanc. Leur origine tient à la fois
des renforts de métal du bouclier médiéval
et plus anciennement des teintures utilisées sur les bannières
Le groupe des couleurs
reconnaît cinq émaux : le rouge, le noir, le bleu,
le vert et le violet qui, dans lhéraldique française,
portent les noms respectifs de gueules pour le rouge, de sable
pour le noir, dazur pour le bleu et de pourpre pour le violet.
Pour colorier à la fois le champ de lécu et
les figures, le gueules, le sable et lazur sont présents
dès les origines alors que le sinople apparaît plus
tard (fin XIIe siècle) dans la coloration des figures avant
de se trouver, dans la première moitié du XIIIe,
sur le champ de lécu. Jusquau XVIIe il est
ignoré dans certain pays comme lAllemagne, la Suisse,
lEurope orientale et les pays scandinaves et reste peu usité
dans les pays dhéraldique classique. Le pourpre,
plus rare encore que le sinople, fut longtemps considéré
par les spécialistes comme une création tardive
du blason, ceci en raison dune mauvaise interprétation
de ce que lhomme médiéval entendait par pourpre.
Le pourpre désigne en ancien français une qualité
de tissu sans indication de couleur. La porpre bise, étoffe
de qualité inférieure de teinte écrue ou
grise, semble par extension avoir donné naissance au pourpre
héraldique ancien, décrit dans plusieurs traités
de blason médiévaux comme le résultat du
mélange de toutes les autres couleurs, ce qui donne une
sorte de gris-brun, couleur un peu sale, ce que les héraldistes
du XVIIe siècle prirent pour de largent oxydé
ou pour un gueules dont le pigment aurait passé. La substitution
du gris par le violet dans les armoiries des XVe et XVIe siècles
sexplique sans doute par la redécouverte de létymologie
latine du mot pourpre.
Létymologie
des noms de couleur du blason reste dailleurs à explorer.
Seul lazur, dérivé de larabe lâzaward,
lui-même dérivé du persan lâdjeward
désignant le lapis-lazuli et par extension la couleur bleue
de cette pierre, a une origine certaine. Pour le gueules, de nombreux
écrits lui prêtent un vague cousinage avec le mot
persan gul signifiant rose, cousinage dont il faudrait
néanmoins approfondir la véracité. Il est
à noter que le rouge héraldique en ancien français
fut aussi nommé sinople. Le glissement sémantique
de ce nom du rouge au vert seffectue dans la seconde moitié
du XIVe siècle de façon inexpliquée. La couleur
verte était auparavant désignée par le mot
vert dans une période où lorthographe nétait
pas entièrement fixée et où il pouvait être
confondu avec le terme vair, désignant une fourrure fort
prisée au Moyen Age constituée de dos et de ventres
décureuil alternés. Ainsi, le terme sinople,
sans doute tombé en désuétude pour caractériser
le rouge, aurait pu représenter pour les techniciens du
blason un moyen de désigner la couleur verte sans la confondre
avec le vair. Le sable, que lon faisait autrefois dériver
du mot slave sobol désignant la fourrure noire de
zibeline, ne fut adopté en France que dans le milieu du
XIIIe siècle. Auparavant la couleur héraldique noire
était désignée simplement du terme noir.
Dans la seconde moitié
du XIIe siècle, les armoiries utilisent en plus des émaux
une autre forme de parement évoquant de façon stylisée
les fourrures dont se servaient parfois les combattants pour renforcer
leur bouclier. Lhéraldique en retient deux, le vair
et lhermine.
Le vair était
dusage courant au Moyen Age, principalement pour doubler
les vêtements du reste fourrure signifie doublure en ancien
français. Constitué de dos (gris bleu) et de ventes
(blanc) de petit-gris, écureuil commun dans toutes les
forêts européennes, il se définit dans le
blason par un alignement de clochettes alternées dargent
et dazur disposées sur plusieurs étages lorsque
la combinaison couvre entièrement le champ de lécu.
Le vair offre plusieurs déclinaisons en fonction de la
taille et du nombre de clochettes ; ainsi le beffroi ou gros vair
est constitué de clochettes de grande taille alors que
le menu-vair est constitué de nombreuses petites clochettes.
Ordinairement dargent et dazur, le vair peut se composer
dautres émaux ; il prend alors le nom de vairé
(vairé dargent et de sable, vairé dor
et de gueules). Les vairés sont dun usage plus courant
que ne le sont le gros vair et le menu-vair. Lhermine, bien
que rare et chère au Moyen Age, se retrouve plus souvent
dans les armoiries médiévales que le vair. Constituée
du pelage blanc de lhermine agrémenté des
touffes noires de la queue de lanimal, elle est représentée
dans le blason par un champ dargent semé de mouchetures
de sable. A lorigine, les mouchetures étaient peu
nombreuses et de petite taille, dessinées de façon
minimaliste. Avec le temps, le nombre des mouchetures augmente
alors que le faisceau de poil les constituant sépaissit
et se trouve muni dune tête composée de trois
points. Lhermine comme le vair peut se composer dautres
émaux que les siens (argent et sable) ; il prend alors
le nom dherminé (d'azur herminé dor,
dor herminé de gueules). Les herminés, bien
que rares, portent pour certains des noms particuliers en héraldique
anglaise. Ainsi, lor herminé de sable est appelé
erminois et le sable herminé dor est appelé
pean. Lhermine dont les émaux sont inversés
(champs de sable, moucheture dargent) prend le nom de contre-hermine.
Deux métaux,
cinq couleurs et deux fourrures constituent les couleurs reconnues
du blason de façon stricte, tant dans les armoiries anciennes
que modernes. On rencontre néanmoins dans lhistoire
du blason quelques autres couleurs demploi rarissime.
Le tanné,
représenté par un orange foncé, et le sanguine,
représenté par un rouge sang, sont des spécificités
de lhéraldique anglaise. Le fer (gris) et le brun
dorigine allemande sont sans doute les héritiers
du pourpre ancien. Le senois, de couleur rouge-brun, rencontré
dans certains armoriaux français de la fin du XIVe siècle,
semble avoir été utilisé pour émailler
les parties accessoires des animaux telles que les griffes et
les langues. Plus anecdotique encore sont les termes de brunâtre,
cendré, bleu ciel et amarante trouvés dans quelques
armoiries dorigine italienne, bohémienne et allemande
du XVIIe et XVIIIe siècles. A partir du XVIIe siècle,
les parties nues du corps humain sont représentées
par un beige rosé imitant la couleur de la peau. Cette
teinte est dailleurs appelée carnation. Notons encore
le terme au naturel, souvent utilisé à lépoque
moderne pour décrire des figures peintes dans leur véritable
coloration. Cette façon réaliste avec ombres et
lumières, teintes et demi-teintes, de représenter
le blason semble plus proche de lallégorie que du
symbolisme héraldique des premiers temps. Elle fut néanmoins
très sollicitée dans les armoiries modernes, en
particulier celles issues de lhéraldique impériale.
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COULEURS DU BLASON ET LES FOURRURES HERALDIQUES
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héraldique de l'alternance des émaux
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